L’année dernière, le Réseau ignatien de solidarité (RIS) a demandé à notre équipe de la Conférence jésuite de produire une vidéo sur l’héritage des martyrs jésuites du Salvador. En 1989, six prêtres jésuites et deux de leurs collaboratrices ont été brutalement assassinés par les forces gouvernementales salvadoriennes sur le campus de l’Université centre-américaine (UCA). C’était pendant la guerre civile.
Notre foi est habitée par les martyrs, ces gens qu’on a tués pour avoir cru et pour avoir agi selon leurs convictions. Leur histoire, leur vie éclaire notre foi. Que nous apprennent les martyrs du Salvador? Qu’ont-ils à nous dire aujourd’hui ?
Dans le cadre de notre recherche, nous avons rencontré Francisco Mena Ugarte. Il est le directeur général de CRISPAZ : Chrétiens pour la paix au Salvador, organisme œcuménique qui cherche à nouer des liens de solidarité entre le Salvador et le reste du monde. Il a connu quelques-uns des martyrs jésuites.
« Ce sont des gens qui auraient pu choisir de ne pas s’impliquer, nous dit-il. Ils auraient pu rester cantonnés à l’université. C’étaient des professeurs : ils auraient pu rester en sécurité. Mais ils se sont sentis concernés. Ils sont sortis et ils ont vraiment mis leurs connaissances et les ressources de l’UCA au service des plus vulnérables. »
En fin de compte, les Jésuites ont été martyrisés parce qu’ils étaient avec les pauvres, les marginaux, les souffrants, les opprimés. Ils se sont opposés aux forces qui cherchaient à maintenir le statu quo et l’exploitation.
Ce point me semble important : ces jésuites auraient pu choisir de ne pas s’impliquer. Ils auraient pu rester sains et saufs à l’abri de l’institution, et s’accommoder d’une situation qui ne leur était pas tellement préjudiciable.
Je me pose la question : derrière quelles institutions nous cachons-nous ? Quelles conventions légalistes, quels titres ronflants, quels prétextes embrouillés nous empêchent de suivre la voie de ces martyrs, la voie du Christ, aux côtés de ceux et celles qui sont le plus dans le besoin ?
Cliquer ici pour visionner la vidéo (en anglais).
« L’université n’était pas là seulement pour donner des diplômes aux enfants des grandes familles, explique le père Kevin Burke, SJ, vice-président à la mission de l’Université Regis. L’UCA était une force sociale pour aider le Salvador à accéder à plus de justice. »
Nos œuvres et nos institutions, quelque forme qu’elles prennent et quelle que soit leur taille (il n’y a pas que les universités), sont-elles là pour aider nos sociétés à accéder à plus de justice ? Ou est-ce que nous servons, par inadvertance, à entretenir des systèmes d’injustice ?
Dans quelques jours, des membres de la famille ignatienne vont affluer à Washington (DC) pour le Teach-in for justice ignatien annuel, une initiative du Réseau ignatien de solidarité. La question de l’injustice est à l’ordre du jour. Notre action se situe dans le prolongement de celle des martyrs : de nouvelles pousses naissent de ces racines profondes et perpétuent un héritage impossible à étouffer.
Comment pouvons-nous, nous aussi, perpétuer cet héritage? Faire le choix de nous engager, de prendre des risques, d’aller vers ce qui n’est pas tout à fait sûr, mais où nous savons que se trouve déjà le Christ ?
La présente réflexion fait partie d’une chronique primée de courriels hebdomadaires. Si vous désirez recevoir des réflexions comme celle-ci chaque mercredi dans votre courrier électronique, inscrivez-vous ici (les courriels ne paraissent qu’en anglais).
Eric A. Clayton est l’auteur de Cannonball Moments: Telling Your Story, Deepening Your Faith (Loyola Press) et directeur adjoint des communications à la Conférence jésuite du Canada et des États-Unis. Ses essais sur la spiritualité, l’art d’être parent et la culture pop ont paru, entre autres, dans la revue America, dans le National Catholic Reporter et dans Busted Halo. Il signe régulièrement des textes sur Give Us This Day et sur le site IgnatianSpirituality.com. Il a publié des œuvres de fiction chez Dark Hare Press, dans le magazine World of Myth et ailleurs. Il vit à Baltimore (Maryland) avec son épouse, leurs deux enfants et leur chat Sebastian. Vous pouvez le suivre en écrivant à l’adresse ericclaytonwrites.com.